Exercice : Liaison et enchaînement consonantique
Lisez à haute voix l’extrait du roman W ou le souvenir d’enfance de Georges Perec en faisant attention à la prononciation des paires de mots liées.
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Lisez à haute voix l’extrait du roman W ou le souvenir d’enfance de Georges Perec en faisant attention à la prononciation des paires de mots liées.
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Pendant un confinement qui est en vigueur déjà depuis quelques semaines, il est essentiel de garder sa bonne humeur. Et quand on ne sait plus comment faire, le mieux est parfois de passer la balle aux expert.es en humour. La série „Fais pas ci, fais pas ça“, en 68 épisodes, réalisée par Anne Giafferi et Thierry Bizot et retransmise sur France 2 entre 2007 et 2017, est parfaite comme rafraîchissement comique très français.
La série nous donne un aperçu de la vie de deux familles parisiennes voisines qui ne pourraient pas être plus différentes. Fabienne et Renaud Lepic forment avec leurs 4 enfants une famille traditionnelle : Fabienne est initialement femme au foyer et plus tard le bras droit du maire de la ville de Sèvres, en banlieue ouest – et chic – de Paris, et Renaud occupe une position importante dans une entreprise qui fabrique des robinets. Les parents prônent des valeurs fondamentales, entre autres le fait qu’une éducation très stricte est la seule méthode effective pour élever des enfants. Ces vues extrêmement conservatrices provoquent de plus en plus de conflits avec leurs enfants, en particulier avec Christophe, leur fils le plus âgé, leur fille Soline, qui devient sur le plan politique toujours plus de gauche, puis Charlotte, dont l’orientation sexuelle choque ses parents. Valérie Bonneton, l’actrice qui joue Fabienne, perd souvent patience (registre soutenu !) et „pique sa crise“ (registre courant !), voire „pète les plombs“ (registre familier !) face à des situations banales qui ne correspondent pas à ses projets ou règles rigides ; ces scènes de „folie subite“ sont très drôles (je vous recommande notamment l’épisode consacré à la rentrée des classes/saison 1, épisode 1, ou encore l’épisode „Bienvenue en Sologne“/saison 8, épisode 1).
A côtéd e cette famille qui représente la famille bourgeoise catholique traditionnelle de droite, on trouve les Bouley, famille recomposée de „bobos“ (= bourgeois-bohèmes). La famille Bouley, composée des parents Valérie et Denis, de leur fils Elliott et de leur fille Tiphaine (née du précédent mariage de Valérie), ne correspond déjà par définition pas à l’idée de famille traditionnelle des Lepic. Les différences se creusent encore plus quand on regarde les professions des parents : la mère travaille dans le secteur de la communication, une branche moquée par la bourgeoisie issue des Grandes Ecoles, et le père est dans une phase de restructuration professionnelle „chronique“ – en bref, il ne travaille pas, mais il cherche encore sa vocation et pratique les métiers les plus farfelus, de chanteur dans une maison de retraite jusqu’à entraîneur motivationnel, le tout avec un succès limité et mitigé. Tandis que Tiphaine n’a pas beaucoup d’ambition, leur fils les provoque sans cesse en remettant en question leurs valeurs de gauche et en pointant leurs incohérences. Il a notamment le projet de devenir ministre de l’intérieur, pour un parti conservateur.
L’histoire des deux familles, dans chaque maison séparément et également l’interaction entre elles, utilise beaucoup d’archétypes français et nous montre un peu du quotidien de familles aisées en région parisienne, bien entendu en exagérant quelques aspects pour obtenir une bonne comédie. Les mères sont un peu hystériques, les pères un peu dépassés, les enfants font ce qu’ils peuvent dans ces contextes familiaux un peu chaotiques mais très chaleureux, et le tout se passe dans le cadre d’échanges verbaux rapides et drôles. Celles et ceux qui cherchent un peu de divertissement à la française et veulent se maintenir au contact d’une langue quotidienne actuelle trouveront cette série accessible librement sur youtube.
Amusez-vous bien !
Pour dire la vérité, on ne sait pas grand-chose des Mille et Une Nuits. Et je ne vous parle pas des contes pour enfants ou des films de Walt Disney, mais d’un classique de la littérature mondiale. Il est temps de combattre les préjugés sur cette histoire trop connue et finalement méconnue. Quelle leçon tirons-nous du destin de Shéhérazade ? Est-ce qu’on pourrait transférer les idées de cette histoire à notre époque ? Shéhérazade raconte pour survivre – mais la littérature peut-elle encore nous sauver la vie ?
Quand nous entendons Les Mille et Une Nuits, nous pensons aux mondes lointains et étrangers, au génie de la lampe, aux tapis volants, aux autres traditions, aux contes pour enfants et beaucoup plus. Cette œuvre n’est pas un récit emprunté à un film de Disney, mais un classique de la littérature mondiale. Les Mille et Une Nuits est un recueil de contes populaires d’origine arabe, et aussi persane et indienne, écrit en langue arabe et remonte à l’année 250 : un conteur anonyme a raconté quelque chose, un autre l’a divulgué, un autre l’a écrit, un autre encore l’a traduit et changé et ainsi de suite. Et si votre curiosité est éveillée maintenant et que vous avez décidé de lire l’œuvre, il y a un seul problème : il n’existe pas de version originale ! Ce qui existe, c’est le Manuscrit de Galland qui est paru vers 1450. Ce texte est considéré comme la version la plus ancienne en arabe des Mille et Une Nuits. Antoine Galland (1646-1715), orientaliste français, a publié la première traduction française de ce manuscrit de 1704 à 1708. Ce qui est frappant, c’est que les histoires sont très brutales et sexuelles. En outre, toutes les histoires sont un récit à suspense : c’est en effet Shéhérazade qui a inventé le cliffhanger (ou suspens) Essayez d’arrêter de raconter une histoire au moment le plus captivant en couchant un enfant. Je vous garantis que l’enfant ne s’endormira pas ! Et voilà, la première méprise, à savoir celle consistant à dire que Les Mille et Une Nuits sont des contes pour enfants, est corrigée. Peu avant la publication de Galland, les contes de fées pour enfants sont devenus célèbres en France grâce à Charles Perrault. Et pourquoi ne pas ranger les histoires des Milles et Une Nuits, récemment importées, parmi ce genre, que cela plaise ou non ? Aussitôt dit, aussitôt fait. Galland adapte les contes au public des lecteurs de ce temps-là et ajoute les histoires comme par exemple celle du capitaine Sinbad, d’Aladin ou d’Ali Baba. Ainsi, il replace l’œuvre originale dans un livre pour enfants.
Les Mille et Une Nuits consistent en un récit-cadre et des récits encadrés. L’histoire du récit cadre traite du sultan Shahryar, qui a été trompé par son épouse et qui la condamne à mort pour se venger. Il décide de se marier chaque soir avec une femme qu’il fait exécuter le lendemain. Shéhérazade intervient en proposant d’épouser le sultan pour réaliser un plan : raconter chaque nuit au sultan une histoire et s’arrêter le lendemain au moment le plus captivant pour qu’il ne puisse pas l’exécuter sans connaître la suite du récit. Ainsi l’exécution est reportée de jour en jour jusqu’à ce que le sultan soit capable de faire de nouveau confiance à une femme. Il décide finalement de renoncer à la faire exécuter.
Bien sûr, avoir l’idée d’infléchir l’attitude du sultan grâce à son récit, suppose une intelligence particulière. Apparemment, pour raconter des histoires, il faut posséder le savoir et la langue, ce que possède Shéhérazade. Néanmoins, toutes les histoires ne viennent pas de son imagination, mais de sa lecture de beaucoup de livres, d’histoires de sagesse et d’écrits de médecine. La narration de Shéhérazade a sauvé sa vie et aussi celle de toutes les femmes du royaume et celle du sultan. En conséquence, cela signifie qu’une éducation littéraire peut sauver la vie.La littérature pourrait-elle vraiment sauver la vie ? Aujourd’hui encore où on n’a plus autant de situations où notre vie est en danger que dans les siècles passés, grâce aux États et ordres juridiques qui fonctionnent ? La plupart de gens diraient que le seul devoir de la littérature est de divertir. Mais c’est une erreur. Chacun de nous, qui lit passionnément, sait d’expérience que les mots, magiques, peuvent nous mettre dans un état délirant. À bien des égards, ils peuvent aussi nous toucher profondément – parfois jusqu’à ce qu’un vers, une histoire ou un roman puissent changer tout notre vie, ne serait-ce que pour un instant. Des livres peuvent changer les perspectives, communiquer le vécu, donner du courage, consoler, inspirer, amuser, toucher et bien plus encore. Ils peuvent en outre nous distraire – de nous, ou de notre vie. Pour quelle autre raison lisons-nous autant pendant les vacances? La littérature peut même être considérée comme une médecine et influe sur la santé positivement. Que quelqu’un soit à l’hôpital ou semble mourir d’un cœur brisé, un bon roman ou conseiller peut donner de nouveau de la force ou de l’inspiration dans des situations dramatiques. L’effet littéraire s’épuise-t-il dans ces aspects évidents et superficiels ? Ou est-ce que quelque-chose de plus se cache encore derrière cela ?
La littérature comme thérapie
On peut considérer la narration de Shéhérazade d’une manière ou d’une autre comme ayant une fonction thérapeutique. Thérapie pour elle-même ou pour le sultan. Quand on jette un coup d’œil sur les destins contemporains, on voit que la littérature est un outil artistique pour exprimer ses sentiments. Dans une interview au quotidien Die Welt, Claudia Ott a cité l’écrivain allemand Arno Schmidt, qui avait constaté que celui qui sait transformer une catastrophe en une histoire, survit. Ici aussi, on peut relever que les auteurs suivent le principe de la narration thérapeutique pour eux-mêmes : l’Allemand Jan Philipp Reemtsma qui a survécu à un enlèvement de 33 jours à cause d’une demande de rançon, a écrit un livre avec le titre allemand Im Keller (fr. Dans la cave). L’Autrichienne Natascha Kampusch été prisonnière pendant 8 ans et a pu s’enfuir. Elle a publié son autobiographie 3096 jours. Le journaliste de Charlie Hebdo, Philippe Lançon, a survécu gravement blessé à l’attentat terroriste sur la rédaction à Paris et a décrit cette expérience dans son livre Le Lambeau. Certains nient utiliser l’écriture et la publication comme thérapie personnelle. Pour eux, il est question de créer de la vérité pour l’avenir et pour la postérité et de l’ancrer dans la mémoire de la collectivité. Mais il faut absolument tenir compte du fait que le travail artistique sur des évènements historiques particuliers, comme dans les exemples, a un grand effet sur la société.
La littérature comme droit de l’homme
En revenant en Orient, les auteurs marocains comme Fatima Mernissi, Abdellah Taïa ou Mohamed Choukri avaient de grandes difficultés pour publier leurs textes. Dans leurs pays, ils n’avaient aucune chance de publier leurs livres parce qu’ils contiennent des sujets tabous, comme l’injustice entre les hommes et les femmes, les violences conjugales, la sexualité ou la drogue. Mais ces auteurs néanmoins ne se taisent pas. Ils donnent leur opinion, pas au Maroc, mais en revanche en France où la société libérale donne un espace sécurisé pour rendre publiques des opinions. Dans leurs pays, ils resteraient inconnus, en tout cas leurs livres. Même s’il ne s’agit pas de sauver une vie au sens propre, il s’agit d’avoir une grande influence sur la liberté. La liberté d’opinion est ancrée dans les droits de l’homme et la littérature en fait partie.
La littérature peut encore sauver la vie au sens psychique, individuellement et collectivement ! En résumé, même si on pouvait appliquer partiellement les structures de la littérature qui pourraient sauver une vie comme dans Les Milles et Une Nuits sur des domaines actuels, elles ne sont pas exactement transposables à cent pourcent. Nous n’avons pas de situations aussi dangereuses qu’une histoire puisse littéralement sauver la vie. Néanmoins, des analogies comme le traitement des expériences traumatisantes ou les droits de l’homme, montrent combien la littérature est importante à tout point de vue. Elle peut être comprise comme une nécessité vitale, comme l’air pour respirer pour l’homme libre dans une société libre. La leçon que nous tirons du destin de Shéhérazade est qu’on doit être courageux et ne jamais désespérer, surtout dans l’Orient d’aujourd’hui, qui ne semble pas du tout fabuleux en ce qui concerne la société ou la politique, de notre perspective. On doit lutter pour ses droits, pour la justice et si c’est possible, pourquoi ne pas utiliser la littérature dans ce but comme Shéhérazade ou beaucoup d’autres ?
Cet article a été rédigé par Nicole Puteick, étudiante en Etudes Francophones à l’Université de Hambourg, dans le cadre du projet „Atelier des Mondes francophones : aux marges du Sahara“ (semestre d’hiver 2019/2020).
La vie palpitante de la ville et la chaleur de midi l’ont fatiguée. Elle veut se cacher. Le Vieux tunnel sous l’Elbe. Un endroit calme, une place qui est capable de l’apaiser et de la protéger. Memento : à côté de l’entrée, sur la mosaïque murale, est accroché un tableau métallique : début de construction de 22 juillet 1907, mise en exploitation le 7 août 1911. Elle le lit et s’imagine Otto Stockhausen, sous la direction duquel ont travaillé 4400 travailleurs. Elle peut presque entendre leurs dialogues et leurs souffles, les bruits des instruments. Elle descend les escaliers en forme de zigzag. 132 marches. Elle compte ses pas mais ne dépêche pas. 131…132. « Geschafft ! ». C’est un de ses mots favoris en allemand. Un mot qui sonne comme un couperet.
Elle y est. C’est frais et humide, ça sent un peu l’eau de Javel. Quelle différence avec l’asphalte brûlant au-dessus d’elle… Personne n’est là. Elle se tient debout au milieu du tunnel, elle doit choisir une direction – la galerie droite. Elle se replonge dans ses souvenirs en marchant lentement sur le trottoir. Sur ses pas a couru Zimmermann, l’encadreur et le restaurateur de tableaux dans L’Ami américain, le film de Win Wenders, là, a marché Saint-John Perse, lauréat du prix Nobel de littérature avec son ami Paul Claudel. Là, tous deux ont philosophé sur la mer que Claudel a nommé plus tard « la vie future ». Et André Dheur, marin liégeois, a lui aussi décrit le tunnel dans ses mémoires intitulées Quinze ans de mer. Tellement de gens ont marqué cet endroit !
Sur les murs des des galeries souterraines elle observe des sculptures en majolique. Elles représentent plusieurs mammifères et des habitants de la faune aquatique. L’une d’elles attire son attention : deux phoques avec le soleil à l’arrière-plan. Ils sont presque symétriquement superposés. Grâce à la faïence, il semble que leurs corps brillent réellement au soleil. Leurs moustaches lui rappellent celle de l’écrivain letton Rudolfs Blaumanis. Elle sourit parce que ça lui semble marrant. En attendant l’ascenseur, elle se retourne et respire encore une fois l’air humide du tunnel. Cette fraîcheur a calmé ses pensées, elle a vu le bout du tunnel.
Cet article a été rédigé par Serafima Kreile, étudiante en Etudes francophones à l’Université de Hambourg.
Je me balade dans la Rappstrasse quand je vois quelque chose qui brille, scintillant à mes pieds. C’est Minna Lazarus, née en 1878.
Mais moi, je suis Monique, une jeune femme allemande originaire de Hambourg, une ville pleine d’histoire.
Dis heures du matin. Le soleil se lève vers la synagogue Bornplatz, près de Dammtor dans le quartier Grindel. Une foule de femmes juives se retrouve devant le grand parvis, bordé avec des pierres en bronze qui brillent au soleil. Mikail plisse les yeux en pensant au bon gâteau au fromage qui l’attend chez sa voisine Minna Lazarus dans la Rappstrasse 13 après la messe. Mikail a huit ans et va à l’école Talmund Tora, la plus grande école juive du nord de l’Allemagne. Comme d’habitude, il passe tous les après-midis du samedi chez sa voisine Minna Lazarus car ses parents sont docteurs et travaillent le samedi. Mais cet après-midi-là va se dérouler autrement. Il ne sait pas encore qu’il ne va jamais goûter ce délicieux gâteau au fromage. En revanche, la mort le sait déjà. La mort donne au ciel les couleurs des juifs. Le ciel vire d’argent au gris.
Avant que Mikail arrive à l’appartement, les Nazis ont déjà évacué l’appartement de Minna dans la Rappstrasse 13. Il ne trouve qu’un appartement vandalisé. Bien-sûr on lui a déjà parlé du sort des juifs et il sait bien ce qui arrivera aussi à Minna. En pensant à elle une larme roule sur sa joue et tombe sur une feuille en papier sur laquelle la larme devient l’encre pour écrire sa dernière expression en entendant la voie de Max Jacob…
AMOUR DU PROCHAIN
Qui a vu le crapaud traverser la rue ?
C’est un tout petit homme : une poupée n’est pas la plus minuscule.
Il se traîne sur les genoux : il a honte on dirait,
-Non. Il est rhumatisant, une jambe reste en arrière, il la ramène.
Où va-t-il ainsi ? Il sort de l’égout, pauvre clown.
Personne n’a remarqué ce crapaud dans la rue ;
Jadis, personne ne me remarquait dans la rue.
Maintenant, les enfants se moquent de mon étoile jaune.
Heureux crapaud !… Tu n’as pas d’étoile jaune. (Max Jacob – Drancy)
Je me balade quand je vois quelque chose qi brille, scintillant à mes pieds devant la porte du bâtiment 13 de la Rappstrasse. C’est Minna Lazarus, née en 1878, assassinée le 13.03.1943 au camp de concentration de Theresienstadt.
C’est une petite plaque en bronze qui scintille au soleil.
Et qu’est-il arrivé à Mikail ? Nous ne le savons pas. A-t-il survécu à l’Holocauste ? A-t-il également une plaque à son nom dans une rue ?
Cet article a été rédigé par Monique Schwesig, étudiante en Etudes francophones à l’Université de Hambourg.