Jo Güstin – en Allemagne, peut-être un nom qui n’est pas encore très connu. C’est exactement ce que nous voulons changer !
Jo Güstin est née en 1987 à Douala. Pendant son enfance, elle a vécu au Cameroun avec ses parents ingénieurs qui l’ont soutenue dans sa décision d’émigrer en France à 15 ans afin de poursuivre sa scolarité au lycée et ensuite ses études à la prestigieuse école de commerce HEC. Une histoire typique d’immigration en France ?
Cela n’est pas du tout le cas. Jo Güstin n’a pas suivi la vie professionnelle qui était prévue après une telle formation. Au lieu de cela, elle est devenue artiste – autrice, humoriste et productrice pour le label dearnge society. Une des raisons pour lesquelles elle a décidé de s’exprimer à l’aide de l’art est son homosexualité, une circonstance qui est encore passible de prison au Cameroun, et son expérience comme femme et Noire en France, mais aussi dans les autres pays où elle a vécu – l’Allemagne et les États Unis. Dans ses oeuvres, elle se pose souvent la question de comprendre pourquoi elle ne se sent pas française bien qu’elle soit naturalisée depuis très longtemps, et elle réfléchit sur ses expériences comme femme francaise camerounaise.
Le terme qui réunit tous ces aspects est l’intersectionnalité, un concept qui commence à dominer le discours féministe et qui se trouve au centre des mouvements progressistes de protestation comme le mouvement Black Lives Matter, venu des Etats-Unis en Europe et dans d’autres parties du monde. La théorie intersectionnelle comprend la discrimination comme une combinaison des facteurs ethnicité, classe, genre et identité sexuelle.
Dans son premier recueil de nouvelles, paru en 2017 aux éditions Présence Africaine et intitulé 9 Histoires lumineuses où le bien est le mal, Jo Güstin célèbre la diversité sexuelle en racontant des histoires inspirées de la réalité qu’elle vit. La protagoniste Coucou, une petite fille Noire qui a internalisé le racisme de son entourage et de sa propre mère, raconte, dans une perspective naive et innocente, ses expériences et comment son seul rêve et souhait est d’être blanche. Son premier roman, Ah Sissi, il faut souffrir pour être française !, paru en 2019 chez le même éditeur, est un mélange complexe des expériences vécues par l’autrice en tant que femme immigrée, Noire et queer en France. Sissi, la narratrice, aborde beaucoup de thèmes extrêmement actuels en incluant la perspectives des femmes transgenres racisées et en discutant d’une manière humoristique le fait que même naturalisées francaises, elles ne sont pas vues comme telles. Le roman parle du patriarchat, particulièrement du patriarchat blanc que l’autrice vit depuis une période si longue, du post-colonialisme, un sujet évité à tout prix dans le pays coloniaux européens, du racisme et du sexisme.
Le style humoristique de Jo Güstin est réconfortant vu que les sujets qu’elle aborde sont si lourds. Pour tou.te.s ceux et celles qui souhaitent un petit échantillon de son art, elle parle ouvertement de tous les sujets décrits en haut dans le cadre du podcast Contes et Légendes du Queeristan.
Zeina Abirached, dessinatrice et écrivaine vivant à Paris, est née à Beyrouth en 1981 – au coeur de la guerre civile libanaise. Elle a fait ses études à l’Académie Libanaise des Beaux-Arts de Beyrouth et à l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris. Elle a toujours eu une prédilection pour le dessin et son enfance pendant la guerre l’a toujours préoccupée, mais elle n’a pas choisi de répondre directement aux attentes extérieures liées à une telle biographie.
Zeina Abirached est entrée dans le monde du BD au début des années 2000 avec ses premiers romans graphiques intitulés 38, rue Youssef Semaani (2006), [Beyrouth] Catharsis (2006) et Je me souviens, Beyrouth (2008), dans lesquels elle raconte ses souvenirs d’enfance pendant la guerre. A première vue, son oeuvre semble donc prévisible. Mais en lisant ses romans supposément de guerre, la question imminente que chacun.e se pose est : il est où, le sang ? Elle est où, la misère que lègue une guerre ? Elles sont où, les images effroyables de gens blessés ? Tous ces stéréotypes des guerres ne constituent pas les aspects déterminants des histoires racontées par Zeina Abirached. Au contraire, l’autrice dépeint la réalité d’une vie pendant la guerre telle qu’elle l’a vécue à ce moment-là : comme enfant.
La violence de la guerre est illustrée très subtilement, par exemple par des bruits de coups de feu qu’elle entend en jouant dans sa petite rue ou par les chemins secrets traversant la ville. Dans son ouvrage Mourir, partir, revenir – Le jeu des hirondelles (2007), sélectionné au festival d’Angoulême en 2008, l’artiste explique l’impact que le partitionnement en Beyrouth Est et Beyrouth Ouest a eu sur les citoyen.nes en racontant de petites histoires au lieu de la grande Histoire. En illustrant la vie quotidienne de sa famille, de ses voisin.es et de ses ami.es depuis sa perspective enfantine, Zeina Abirached réussit à évoquer d’une manière très émouvante les angoisses et les tracas des personnages déclenchés par les bombardements et d’autres situations de danger. Elle n’essaie pas du tout d’embellir le horreurs de la guerre civile, mais la douceur de l’enfance qui accompagne tous ses récits transmet une réalité à laquelle chacun.e peut s’identifier et qui nous apporte une proximité exceptionnelle avec le monde affectif des personnages marqués par les trauma de la guerre.
À l’aide de son art, l’artiste intégre ses mémoires de guerre et de sa vie d’après. Le bilinguisme et la coexistence du français et de l’arabe dans sa vie jouent des rôles très importants dans ses oeuvres. Le roman Piano oriental (2015) raconte l’histoire de son ancêtre qui inventa un piano oriental – un piano „bilingue“ – à Beyrouth pendant les années 1960. Cette histoire achronique qui prend place dans le cadre de l’histoire de son départ du Liban et de ses premières expériences en France met en valeur le principe de la transculturalité et le fait qu’il est impossible de décider quelle langue, quel pays ou quelle identité culturelle domine ou est plus important que l’autre. Son regard innocent nous fait comprendre le chaos qui vivent les personnes transculturelles, pour qui les frontières entre les différenets identités culturelles sont floues et chez qui deux langues fonctionnent comme une.
Dans son récit le plus récent, co-écrit avec Mathias Énard, Prendre refuge (2018), Zeina Abirached entremêle de nouveau deux histoires différentes, deux histoires d’amour transculturelles atypiques se déroulant à deux époques très complexes : en 1939 en Afghanistan et en 2016 en Allemagne. Zeina Abirached continue d’intégrer ses souvenirs d’enfance et ses expériences comme témoin d’une guerre affreuse et comme femme transculturelle en Europe. De nos jours, le travail d’assimilation de nos identités mises en réseau par le monde digital et la mondialisation est très important pour trouver et définir le chemin d’une nouvelle „normalité“.
La langue française est bien connue pour beaucoup de bizarreries, entre autres pour sa prononciation particulière et ses mots rigolos. Mais, par ailleurs, cette langue cache une multitude d’expressions farfelues !
Quelles expressions connais-tu ? Essaye d’associer les expressions et leur explication !
Ta poésie ne m’est pas plus cachée que celle de tout autre objet aussi habituel ou plus rare.
Il y a longtemps que j’ai fait le projet de m’occuper de toi, sans doute parce que je m’en veux de me servir quotidiennement de toi, quasi machinalement et sans y prendre garde, puis de te rejeter ou de te laisser retomber comme si tu ne m’étais de rien.
Il me faut aujourd’hui réparer cette injustice.
Lorsque je te saisis, chère brosse à dents,ton manche en plastique tient si parfaitement dans ma main et ta tête, recouverte de petites touffes formées de poils, nettoie si confortablement les espaces inter dentaires dans ma bouche que je n’ai plus envie de te lâcher. Chaque jour, quand j’entre dans la salle de bain après avoir déjeuné ou dîné, c’est un plaisir pour moi que le contact de ton manche familier.
Nul doute que je sois fière de posséder une ou plusieurs brosses à dents, comme certains sont fiers de leur caniche immaculé ou de leur troupeau de moutons frisés. Depuis longtemps, tu fais en sorte que mes dents soient toujours en bon état, ne deviennent pas jaunes ni ne se cassent pas. Ma dentiste me félicite, chaque fois que je lui rends visite, de mon excellente hygiène bucco – dentaire. Tu n’as pas besoin d’être électrique ou équipée de nombreuses fonctions supplémentaires pour que je reconnaisse ta valeur.
Je te manifeste d’ailleurs aussitôt ma satisfaction en achetant le meilleur dentifrice que je puisse trouver au supermarché. Je te garde, hors de danger, dans un verre en plastique pour que tu puisses te reposer durant les heures pendant lesquelles je t’abandonne.
Elle m’attend toute la journée à la maison, avec les autres meubles. Mais ce n’est qu’une simple brosse à dents. C’est mon amie. C´est elle la première qui, le matin, l’après – midi et le soir, sait exactement ce que j’ai mangé il y a quelques instants.
Poème écrit par Julia Chlebdaà la manière de Francis Ponge, dans le cadre du cours Expression Écrite et Orale 1 de Julie Müller au semestre d’été 2020.
La poésie : un sujet sur lequel les avis divergent pour toujours dans notre société moderne. Les un.es adorent le langage esthétique, les autres n’ont que faire des expressions artificielles qui ne trouvent plus du place dans notre langue quotidienne.
Dans le cadre de notre série des récitations des poèmes effectuées par les étudiant.es en Romanistique, nous vous présentons la version du poème “ Liberté “ par Paul Éluard de l’étudiante Kathlin Gallo.
Ce poème ouvre le recueil “ Poésie et Vérité „, mettant par cela en évidence l’essence des oeuvres poétique dites poèmes de la résistance pour lesquels Éluard est célèbre. Le contexte historique d’une France occupée et divisée joue un rôle important dans la recherche du véritable sens de la liberté comme conception et comme mot. Notre étudiante nous fait sentir la gravité du concept, nous rappelant par cela la valeur de la liberté que nous considérons comme allant de soi.
La récitation a été réalisée dans le cadre du cours Expression Écrite et Orale 1, tenu par Julie Müller.